3 questions à Maxime Schwartz

3 questions à Maxime Schwartz

Pasteur, un savant visionnaire ?

1.    Un précurseur de l’interdisciplinarité ?

Ses premiers travaux étaient à l’interface entre la physique et la chimie. La cristallographie et l’optique l’amènent à formuler des hypothèses sur la structure des molécules. Il constate que dans la mesure où elles agissent sur la lumière polarisée, elles doivent provenir d’organismes vivants ; comme elles sont produites au cours des fermentations, il en conclut qu’elles sont causées par des microorganismes. Il passe ainsi de la chimie à la microbiologie. Convaincu que les maladies contagieuses, comme les fermentations, sont dues à des microorganismes, il s’intéresse aux maladies animales. La microbiologie le conduit ainsi à la médecine vétérinaire avant, avec le vaccin contre la rage, de faire le saut vers la médecine humaine.

2.    Un pionnier de la santé globale (One Health) ?

Société centrale de médecine vétérinaire, 1880 : « Ce n’est pas sans un certain étonnement que je me trouve aujourd’hui au milieu de vous et que je me trouve chaque semaine au milieu des membres de l’Académie de médecine, moi qui suis si peu médecin, si peu vétérinaire. Cependant, ma présence dans ces compagnies peut s’expliquer aisément quand on considère que la science est une, et que c’est l’homme seulement qui, en raison de la faiblesse de son intelligence, y établit des catégories ». Puis, lorsqu’il décrit l’atténuation des microbes virulents, il prévoit qu’inversement, des microbes provenant d’espèces animales pourraient s’adapter à l’homme. Avant d’ajouter : « Je suis très porté à croire que c’est ainsi que sont apparues, à travers les âges, la variole, la syphilis, la peste, la fièvre jaune, etc, et que c’est également par des phénomènes de ce genre qu’apparaissent, de temps à autre, certaines grandes épidémies... »

3.    Inventeur, avec la vaccination, de la santé publique ?

Il ne l’a pas inventée mais il lui a donné un formidable élan. Le développement de l’hygiène date du XVIIIe siècle, mais Pasteur lui a donné une base scientifique et a inventé les moyens de se protéger contre les microbes. La vaccination contre la variole s’est ainsi progressivement imposée au cours du XIXe siècle mais, en généralisant cette protection contre de nombreuses maladies,
les vaccins se sont imposés dans les politiques de santé publique.

* Biologiste moléculaire, ancien directeur de l’Institut Pasteur (Paris), membre correspondant de l’Académie des Sciences

Maxime SCHWARTZ et Annick PERROT, Pasteur, l’homme et le savant, Tallandier, 2022